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14/02/2025

Claire fontaine

 

Claire fontaine

Claire fontaine où rossignole

Un rossignol jamais lassé,

N’es-tu pas le charmant symbole

D’un cher passé ?

Source de fraîche mélodie,

Qui fait fleurir, sous nos frimas,

Ce rosier blanc de Normandie,

Qui ne meurt pas !

À ce bouton de rose blanche,

L’hiver ne fut jamais fatal,

Non plus qu’au chêne qui se penche

Sur ton cristal.

Oh ! c’est une peine immortelle

Qui s’épanche, en larmes d’amour,

Dans la naïve ritournelle

De l’ancien jour.

C’est un reflet des ciels de France,

Ô fontaine, que tu fais voir,

Dans la limpide transparence

De ton miroir.

Nérée Beauchemin

Sylvie Erwan 

07/02/2025

Campanile d’Hiver

 


Campanile d’Hiver

La vigne endolorie sous le poids des nuages,

Pareille au clapotis des barques enchainées,

Gémit, pleure et s’éteint comme un brasier mouillé

Par la rage du ciel et son gravier d’outrages.

Les lavoirs de soleil et leurs lourds sarcophages

Ruissellent de tumeurs aux couleurs bigarrées,

Comme si leur destin se tissait sous les dès

De gouttes détachées d’un suaire sauvage.

Seule, morne et feutrée, une cloche d’airain

Sonne un glas parfumé d’une douce beauté

Dont le silence boit la mélodie sans fin.

Or la vigne endurcie, comme un oratorio,

Fugue le long de mots brillants de nouveauté,

Que ce poème joue sur un pas d’adagio.

Francis Etienne Sicard, Odalisques, 1975

 

Sylvie Erwan 

31/01/2025

Beau soir d’hiver

 

Beau soir d’hiver


La neige – le pays en est tout recouvert –

Déroule, mer sans fin, sa nappe froide et vierge,

Et, du fond des remous, à l’horizon désert,

Par des vibrations d’azur tendre et d’or vert,

Dans l’éblouissement, la pleine lune émerge.


A l’Occident s’endort le radieux soleil,

Dans l’espace allumant les derniers feux qu’il darde

A travers les vapeurs de son divin sommeil,

Et la lune tressaille à son baiser vermeil

Et, la face rougie et ronde, le regarde.


Et la neige scintille, et sa blancheur de lis

Se teinte sous le flux enflammé qui l’arrose.

L’ombre de ses replis a des pâleurs d’iris,

Et, comme si neigeaient tous les avrils fleuris,

Sourit la plaine immense ineffablement rose.


Jules Breton

Les champs et la mer, 1883


Sylvie Erwan 

17/01/2025

Nuits d’hiver


 

Nuits d’hiver


Comme la nuit tombe vite !

Le jour, en cette saison,

Comme un voleur prend la fuite,

S’évade sous l’horizon.


Il semble, ô soleil de Rome,

De l’Inde et du Parthénon,

Que, quand la nuit vient de l’homme

Visiter le cabanon,


Tu ne veux pas qu’on te voie,

Et que tu crains d’être pris

En flagrant délit de joie

Par la geôlière au front gris.


Pour les heureux en démence

L’âpre hiver n’a point d’effroi,

Mais il jette un crêpe immense

Sur celui qui, comme moi,


Rêveur, saignant, inflexible,

Souffrant d’un stoïque ennui,

Sentant la bouche invisible

Et sombre souffler sur lui,


Montant des effets aux causes,

Seul, étranger en tout lieu,

Réfugié dans les choses

Où l’on sent palpiter Dieu,


De tous les biens qu’un jour fane

Et dont rit le sage amer,

N’ayant plus qu’une cabane

Au bord de la grande mer,


Songe, assis dans l’embrasure,

Se console en s’abîmant,

Et, pensif, à sa masure

Ajoute le firmament !


Pour cet homme en sa chaumière,

C’est une amère douleur

Que l’adieu de la lumière

Et le départ de la fleur.


C’est un chagrin quand, moroses,

Les rayons dans les vallons

S’éclipsent, et quand les roses

Disent : Nous nous en allons !


Oh ! Reviens ! printemps ! fanfare

Des parfums et des couleurs !

Toute la plaine s’effare

Dans une émeute de fleurs.


La prairie est une fête ;

L’âme aspire l’air, le jour,

L’aube, et sent qu’elle en est faite ;

L’azur se mêle à l’amour.


On croit voir, tant avril dore

Tout de son reflet riant,

Éclore au rosier l’aurore

Et la rose à l’orient.


Comme ces aubes de flamme

Chassent les soucis boudeurs !

On sent s’ouvrir dans son âme

De charmantes profondeurs.


On se retrouve heureux, jeune,

Et, plein d’ombre et de matin,

On rit de l’hiver, ce jeûne,

Avec l’été, ce festin.


Oh ! mon coeur loin de ces grèves

Fuit et se plonge, insensé,

Dans tout ce gouffre de rêves

Que nous nommons le passé !


Je revois mil huit cent douze,

Mes frères petits, le bois,

Le puisard et la pelouse,

Et tout le bleu d’autrefois.


Enfance ! Madrid ! campagne

Où mon père nous quitta !

Et dans le soleil, l’Espagne !

Toi dans l’ombre, Pepita !


Moi, huit ans, elle le double ;

En m’appelant son mari,

Elle m’emplissait de trouble… –

O rameaux de mai fleuri !


Elle aimait un capitaine ;

J’ai compris plus tard pourquoi,

Tout en l’aimant, la hautaine

N’était douce que pour moi.


Elle attisait son martyre

Avec moi, pour l’embraser,

Lui refusait un sourire

Et me donnait un baiser.


L’innocente, en sa paresse,

Se livrant sans se faner,

Me donnait cette caresse

Afin de ne rien donner.


Et ce baiser économe,

Qui me semblait généreux,

Rendait jaloux le jeune homme,

Et me rendait amoureux.


Il partait, la main crispée ;

Et, me sentant un rival,

Je méditais une épée

Et je rêvais un cheval.


Ainsi, du bout de son aile

Touchant mon coeur nouveau-né,

Gaie, ayant dans sa prunelle

Un doux regard étonné,


Sans savoir qu’elle était femme,

Et riant de m’épouser,

Cet ange allumait mon âme

Dans l’ombre avec un baiser.

Mal ou bien, épine ou rose,


A tout âge, sages, fous,

Nous apprenons quelque chose

D’un enfant plus vieux que nous.


Un jour la pauvre petite

S’endormit sous le gazon… –

Comme la nuit tombe vite

Sur notre sombre horizon !

Victor Hugo, Les quatre vents de l’esprit

Sylvie Erwan 

03/01/2025

Voici venir l’Hiver, tueur des pauvres gens.

 

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Voici venir l’Hiver, tueur des pauvres gens.

Ainsi qu’un dur baron précédé de sergents,
Il fait, pour l’annoncer, courir le long des rues
La gelée aux doigts blancs et les bises bourrues.
On entend haleter le souffle des gamins
Qui se sauvent, collant leurs lèvres à leurs mains,
Et tapent fortement du pied la terre sèche.
Le chien, sans rien flairer, file ainsi qu’une flèche.
Les messieurs en chapeau, raides et boutonnés,
Font le dos rond, et dans leur col plongent leur nez.
Les femmes, comme des coureurs dans la carrière,
Ont la gorge en avant, les coudes en arrière,
Les reins cambrés. Leur pas, d’un mouvement coquin,
Fait onduler sur leur croupe leur troussequin.

Oh ! comme c’est joli, la première gelée !
La vitre, par le froid du dehors flagellée,
Étincelle, au dedans, de cristaux délicats,
Et papillote sous la nacre des micas
Dont le dessin fleurit en volutes d’acanthe.
Les arbres sont vêtus d’une faille craquante.
Le ciel a la pâleur fine des vieux argents.

Voici venir l’Hiver, tueur des pauvres gens.

Voici venir l’Hiver dans son manteau de glace.
Place au Roi qui s’avance en grondant, place, place !
Et la bise, à grands coups de fouet sur les mollets,
Fait courir le gamin. Le vent dans les collets
Des messieurs boutonnés fourre des cents d’épingles.
Les chiens au bout du dos semblent traîner des tringles.
Et les femmes, sentant des petits doigts fripons
Grimper sournoisement sous leurs derniers jupons,
Se cognent les genoux pour mieux serrer les cuisses.
Les maisons dans le ciel fument comme des Suisses.
Près des chenets joyeux les messieurs en chapeau
Vont s’asseoir ; la chaleur leur détendra la peau.
Les femmes, relevant leurs jupes à mi-jambe,
Pour garantir leur teint de la bûche qui flambe
Étendront leurs deux mains longues aux doigts rosés,
Qu’un tendre amant fera mollir sous les baisers.
Heureux ceux-là qu’attend la bonne chambre chaude !
Mais le gamin qui court, mais le vieux chien qui rôde,
Mais les gueux, les petits, le tas des indigents…

Voici venir l’Hiver, tueur des pauvres gens.

Jean Richepin, La chanson des gueux

Sylvie Erwan 


27/12/2024

Promenade blanche de vieille France

   


Promenade blanche de vieille France


L’écrasement de la neige sous les bottes

Les branches cassées sur le chemin

Le cliquetis régulier de quelques gouttes s’échappant des stalactites de glace

Des flocons perdus aux quatre vents tombent des arbres aplatis

Les cheminées dégagent des parfums de tarte de grand mère

Les chalets chauds au pied des pentes raides ou s’étirent jusqu’au firmament les grands sapins

Les luges qui glissent sans laisser place au silence de ce lieu la nuit

Des cris de joie,

Des boules de neige,

Le ciel et ses nuages blancs

Tout est ici comme l’enfance

comme un voyage du temps jadis

Tout est ici comme en vieille France

Images d’Epinal, simplicité, absence, magie

C’est la plus belle promenade blanche de ma vie


Elodie Santos, 2008


Sylvie Erwan 

20/12/2024

Que j’aime le premier frisson d’hiver…

Que j’aime le premier frisson d’hiver…


Que j’aime le premier frisson d’hiver ! le chaume,

Sous le pied du chasseur, refusant de ployer !

Quand vient la pie aux champs que le foin vert embaume,

Au fond du vieux château s’éveille le foyer ;


C’est le temps de la ville. – Oh ! lorsque l’an dernier,

J’y revins, que je vis ce bon Louvre et son dôme,

Paris et sa fumée, et tout ce beau royaume

(J’entends encore au vent les postillons crier),


Que j’aimais ce temps gris, ces passants, et la Seine

Sous ses mille falots assise en souveraine !

J’allais revoir l’hiver. – Et toi, ma vie, et toi !


Oh ! dans tes longs regards j’allais tremper mon âme

Je saluais tes murs. – Car, qui m’eût dit, madame,

Que votre coeur sitôt avait changé pour moi ?


Alfred de Musset

Sylvie Erwan 

13/12/2024

Soir d’hiver

  

Soir d’hiver

Ah ! comme la neige a neigé !

Ma vitre est un jardin de givre.

Ah ! comme la neige a neigé !

Qu’est-ce que le spasme de vivre

À la douleur que j’ai, que j’ai !


Tous les étangs gisent gelés,

Mon âme est noire : Où vis-je ? Où vais-je ?

Tous ses espoirs gisent gelés :

Je suis la nouvelle Norvège

D’où les blonds ciels s’en sont allés.


Pleurez, oiseaux de février,

Au sinistre frisson des choses,

Pleurez, oiseaux de février,

Pleurez mes pleurs, pleurez mes roses,

Aux branches du genévrier.


Ah ! comme la neige a neigé !

Ma vitre est un jardin de givre.

Ah ! comme la neige a neigé !

Qu’est-ce que le spasme de vivre

À tout l’ennui que j’ai, que j’ai !…


Emile Nelligan

Œuvres poétiques complètes I : Poésies complètes 1896-1941

Sylvie Erwan 

 

Bon week-end et bonne semaine

  Bonjour à tous     C'est avec toute mon amitié que je viens vous souhaiter une bon week-end. u...