La cité natale
Heureux qui dans sa ville, hôte de sa maison,
Dès le matin joyeux et doré de la vie
Goûte aux mêmes endroits le retour des saisons
Et voit ses matinées d’un calme soir suivies.
Fidèles et naïfs comme de beaux pigeons
La lune et le soleil viennent sur sa demeure,
Et, pareille au rosier qui s’accroît de bourgeons,
Sa vie douce fleurit aux rayons de chaque heure.
Il va, nouant entre eux les surgeons du destin,
Mêlant l’âpre ramure et les plus tôt venues,
Et son coeur ordonné est comme son jardin
Plein de nouvelles fleurs sur l’écorce chenue.
Heureux celui qui sait goûter l’ombre et l’amour,
De l’ardente cité à ses coteaux fertiles,
Et qui peut, dans la suite innombrable des jours,
Désaltérer son rêve au fleuve de sa ville.
Anna de Noailles, Le coeur innombrable
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