À une Femme
Tendre à qui te lapide et mortelle à qui t’aime, Faisant de l’attitude un frisson de poème, O Femme dont la grâce enfantine et suprême Triomphe dans la fange et les pleurs et le sang,
Tu n’aimes que la main qui meurtrit ta faiblesse, La parole qui trompe et le baiser qui blesse, L’antique préjugé qui meurt avec noblesse Et le désir d’un jour qui sourit en passant.
Férocité passive, âme légère et douce, Pour t’attirer, il faut que le geste repousse : Ta chair inerte appelle, en râlant, la secousse Et l’effort sans beauté du mâle triomphant.
Esclave du hasard, des choses et de l’heure, Être ondoyant, en qui rien de vrai ne demeure, Tu n’accueilles jamais la passion qui pleure Ni l’amour qui languit sous ton regard d’enfant.
Le baume du banal et le fard du factice, L’absurdité des lois, la vanité du vice Et l’amant dont l’orgueil contente ton caprice, Suffisent à ton cœur sans rêve et sans espoir.
Jamais tu ne t’éprends de la grâce d’un songe, D’un reflet dont le charme expirant se prolonge, D’un écho dans lequel le souvenir se plonge, Jamais tu ne pâlis à l’approche du soir. Renée Vivien, Cendres et Poussières, 1902
Sylvie Erwan
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Grand bravo ma doucette.
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